Dans la foule et sur les pancartes, une demande : que les panneaux soient placés sur des surfaces déjà bétonnées. "Nous ne sommes pas anti-panneaux", nous explique une manifestante, "mais il faut qu’ils soient placés sur du béton, des parkings, des toits de bâtiments. Pas sur des terres viables qui peuvent aider à nourrir la population."
Thomas Huyberechts confirme : "Il y a beaucoup d’autres endroits où on peut aller mettre des panneaux, des panneaux solaires et donc nous, ce qu’on demande clairement, c’est un moratoire sur les permis agrivoltaïque. C’est-à-dire que tant qu’on n’a pas trouvé des conditions et qu’on n’est pas tous d’accord sur comment on peut les mettre, c’est qu’on interdise clairement les nouveaux permis en Wallonie."
Le gouvernement wallon a sorti, en mars dernier, une circulaire sur le sujet. Contacté, le cabinet du vice-président wallon et ministre de l'Economie Willy Borsus (MR) nous répond : "Ma volonté est bien de conserver le principe consistant à privilégier l’installation photovoltaïque intégrée dans le paysage et qui n’a pas d’impact sur l’occupation du sol. Le développement des installations photovoltaïques en toiture, en élévation, ou encore en couverture de surfaces minéralisées (voirie, parking, espace de stockage, etc.) doit en effet être poursuivi et intensifié, le potentiel disponible étant encore considérable. C’est, pour moi, la voie qu’il faut impérativement privilégier."
Le ministre ajoute : "En outre, la circulaire précise prévoit qu’il est possible d‘utiliser des sites où il est démontré que la qualité agronomique du sol est médiocre. Ceci permettra d’utiliser des espaces impropres à la production agricole tels des parkings, d’anciennes décharges ou d’autres terrains dégradés. En vue de faire face aux défis de la diversification des sources de production d’énergie, il a toutefois été jugé par le gouvernement que l’expérimentation et les investissements innovants peuvent être admis : la circulaire prévoit dès lors une ouverture à des projets pilotes comportant un champ photovoltaïque au sol, développés en lien avec le monde de la recherche et l’innovation. Si ces dispositifs agrivoltaïques répondent potentiellement à une volonté politique de soutenir la production d’énergie renouvelable, ils peuvent également constituer, sous des conditions strictes d’encadrement, des leviers en faveur des agriculteurs."
Même son de cloche du côté du cabinet du ministre de l'Energie et des Infrastructures Philippe Henry (Ecolo) : "Le gouvernement wallon opte pour équiper des surfaces déjà artificialisées ou les toits des bâtiments existants, pas pour des champs de panneaux".
Les prix étaient déjà inaccessibles pour des agricultrices ou des agriculteurs. Ils le sont encore plus maintenant et la situation est catastrophique.
Pour les associations, ce n’est pas suffisant : "La réalité nous montre que non. Parce que les prix des terres agricoles continuent à exploser : entre 2017 et 2022, on parle d’une augmentation de plus de 30%", explique Damien Charles, "les prix étaient déjà inaccessibles pour des agricultrices ou des agriculteurs. Ils le sont encore plus maintenant et la situation est catastrophique. On a une population agricole vieillissante et des personnes veulent reprendre ces terres mais ne peuvent financièrement pas se le permettre. Alors aujourd’hui, on se rassemble à Aiseau-Presles parce qu’on pense que c’est un projet sur lequel on peut gagner. La commune s’oppose à ce projet et en période électorale, qui sait, peut-être que la voix des agricultrices, des agriculteurs, des organisations de la société civile pourra être entendue et préserver ces 30 hectares de terres agricoles menacées."
Les manifestants d’aujourd’hui attendent plus qu’une circulaire pour les rassurer : "Une de nos revendications principales, c’est justement que la Région wallonne régule ce marché, se dote des outils nécessaires pour que la terre soit avant tout réservée aux personnes qui produisent notre nourriture. Dans les circulaires émises par le gouvernement wallon, en effet, il y a une position générale contre. Mais il y a des exceptions et on voit que malheureusement, de nombreux projets tombent dans ces exceptions parce que concrètement, on voit les autorisations se multiplier, donc ce n’est pas suffisant pour nous. Il est urgent de réguler le marché foncier agricole."
La commune d’Aiseau-Presles a déjà annoncé aller contre ce projet de 20.000 panneaux photovoltaïques, les personnes mobilisées espèrent que le gouvernement wallon bloquera le projet.