Fedasil Mouscron a quatre ans : originaire d’Azerbaïdjan, Asmar et Farah y vivent depuis les premiers jours
Arrivées d’Azerbaïdjan avec leur mère, Asmar et Farah ont débarqué au Refuge le 26 février 2019. Quatre ans après leurs premiers pas sur le territoire belge, leur procédure de demande d’asile n’a toujours pas abouti…
- Publié le 04-02-2023 à 10h01
Le 22 février 2019, les 26 premiers demandeurs d’asile débarquaient au Refuge. Quatre jours plus tard, Asmar et Farah arrivaient à leur tour dans l’ancien hôpital de la rue du Couvent. Ils n’étaient alors que quelques dizaines à peupler le centre d’accueil de Fedasil. Aujourd’hui, près de 900 résidents vivent entre les murs du Refuge. "Le jour de notre arrivée, nous avons été accueillis par les bénévoles du réseau Mouscron Terre d’Accueil, qui offraient des fleurs à notre descente de bus. C’était très gentil de leur part, ça nous a rassurés", se souvient Asmar. Qui aurait pu prédire que les deux Azéries et leur maman seraient encore au centre alors que le Refuge s’apprête à "fêter" le quatrième anniversaire de sa réouverture ?
Pour de nombreux demandeurs d’asile, la procédure est longue, tumultueuse et semée d’embûches. Mais le découragement n’est pas une option, tant le jeu en vaut la chandelle. Inséparables, les deux sœurs ont fui d’Azerbaïdjan avec leur maman, pour des raisons qu’elles préfèrent passer sous silence. Asmar et Farah ont atterri en Pologne où leurs empreintes ont été enregistrées, avant de rejoindre Bruxelles et le Petit-Château. "Le lendemain, nous arrivions à Mouscron, accompagnées par beaucoup de familles. Par la suite, des jeunes sont arrivés et nous avons commencé à tisser des liens, surtout autour du baby-foot", plaisante Farah. L’Azérie de 27 ans en est même devenue une joueuse aguerrie !
« Un moment difficile nerveusement »
Là commence la longue parenthèse qui ne s’est toujours pas refermée après 48 mois d’attente. "De février à septembre 2019, nous sommes allés huit ou neuf fois à l’office des étrangers dans le cadre de la procédure. On partait le matin pour Bruxelles. Sur place, on attendait plusieurs heures, il ne se passait rien et on rentrait à Mouscron, sans avoir passé d’entretien. C’était incompréhensible ", se souvient encore Asmar.
Les deux sœurs devront patienter jusqu’en février 2020, un an après leur arrivée pour enfin être enregistrées auprès de l’office des étrangers.
Prochaine étape ? Un entretien bien plus poussé au Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides, chargé d’octroyer (ou non) l’asile. Entre les deux rendez-vous, un an et neuf mois s’écoulent, une éternité marquée notamment par le confinement et les différentes vagues d’épidémie de coronavirus, où le centre Fedasil s’est replié sur lui-même, pas par choix. "C’était en octobre 2021. L’entretien se faisait séparément. Il a duré entre une et deux heures", rappelle Farah. Devant les agents, les deux jeunes femmes évoquent leur parcours, leur personnalité, leur motivation aussi. "J’étais nerveuse. C’était un moment très angoissant", poursuit l’Azérie.
« On se doit de rester fortes »
La sentence tombe en décembre de la même année: leur demande d’asile est rejetée. "Notre avocate a fait appel auprès du Conseil du contentieux des étrangers." Là encore, l’issue est négative mais la raison n’est pas précisée. Un deuxième appel est en cours, "sur le fait qu’ils n’aient donné aucune raison et que nous n’avions pas eu de traducteur lors de l’entretien", explique Asmar. Si la réponse est négative, elles auront 30 jours pour quitter le territoire belge et l’espace Schengen.
L’issue ? Elles ne veulent pas y penser. "Ma sœur est plus optimiste que moi", estime Asmar. "On croit en notre avocate et en nos chances. Je ne veux pas me morfondre. Notre mère a des problèmes de santé, on se doit de rester fortes pour elle."
En quatre ans, les Azéries ont vu certaines demandes de leurs amis aboutir, d’autres échouer. Elles se sont investies dans l’équipe de football féminine du Refuge, auprès des enfants du centre dont elles s’occupent fréquemment. Asmar a égayé les murs ternes du Refuge avec plusieurs fresques. Bref, elles ont construit leur vie, en pointillé et avec une épée de Damoclès qui reste encore suspendue au dessus d’elles. Mais elles tiennent, parce qu’elles n’ont pas d’autres choix…
Une issue positive à 34%
Combien de demandes d’asile s’achèvent par une issue positive ? "Les chiffres de 2021 évoquent un taux de 34%", avoue Yohann Miessen, chargé des relations extérieures pour Fedasil Mouscron. "Ils n’ont pas changé depuis. On se rapproche des 50% en deuxième instance, donc suite à un recours."
Un taux qui varie très peu entre les différents centres d’accueil du pays et qui montre une implacable réalité. De nombreuses demandes n’aboutissent pas positivement et obligent la personne déboutée à quitter le territoire national.